Largement utilisées dans la production industrielle et technologique, les terres rares sont un enjeu géopolitique. En novembre, leur prix s’est élevé en Chine, premier producteur mondial qui fait évoluer son arsenal législatif relatif à l’exportation.
Le mois de novembre a agité très fortement le marché des matières premières et métaux précieux avec notamment des larges fluctuations sur le marché du pétrole ou encore sur le marché de l’or. Une autre catégorie de métaux, celle des “terres rares” a elle aussi connu une envolée de son prix en Chine au cours des dernières semaines.
Ce groupe de 17 métaux, dont la Chine représente 61,97% de la production mondiale, a vu son cours flamber sur les marchés mondiaux. Une note de recherche produite parBMO Capital Markets confirme que cette envolée est surtout marquée sur les terres rares utilisées dans la production d’aimants, incluant celles que l’on retrouve notamment dans les micromoteurs, dans les éoliennes et même dans certains appareils électroménagers. Parmi elles, le néodyme avec une augmentation de 27% mais aussi le terbium (+17%), le dysprosium (+17%) ou encore le gadolinium (+9%).
Deux raisons sont évoquées dans ce rapport quant à cette tendance haussière généralisée. La première est l’accroissement des tensions géopolitiques entre la Chine et le bloc occidental. En effet, la situation de monopole de l’Empire du Milieu incite un certain nombre de pays à renforcer leurs productions nationales pour assurer leur sécurité d'approvisionnement. À titre d’exemple, le Canada a entamé un projet de 31 milliards de dollars pour la construction d'installations de traitement de ces métaux. De leur côté, les Etats-Unis ont dès 2019 lancé six plans d’action pour sortir de cette dépendance. On y découvre la volonté de réaliser un travail de recensement des ressources exploitables sur le territoire et de se rapprocher commercialement du Canada et de l’Australie. L’accent est mis également sur des méthodes d’exploitation plus écologiques avec l’utilisation des biotechnologies.
La deuxième raison soulevée dans le rapport est l’entrée en vigueur d’une nouvelle loi en Chine afin de mieux contrôler les exportations stratégiques, dont les terres rares. Selon BMO, « les acteurs du marché sont de plus en plus d’avis que l’introduction de la nouvelle loi entraînera une restriction des exportations de terres rares de Chine vers des partenaires clés, y compris les États-Unis, sous prétexte qu’elle protège sa sécurité nationale. »
Ainsi, loin d’être simplement conjoncturelle, la tendance haussière du prix des terres rares chinoises risque également de se poursuivre dans les mois à venir. Sous l’impulsion de l’entreprise australo-angolaise Pensana, une nouvelle usine de transformation des terres rares va bientôt voir le jour au Royaume-Uni pour tenter de briser le monopole chinois. Le dilemme offert à Pékin est donc relativement simple : poursuivre son bras de fer économique pour maintenir sa position de leader ou assouplir sa politique protectionniste pour prendre de court une diversification des approvisionnements en continuant à inonder le marché.
Evan Tirologos
Pour aller plus loin :
- La dépendance aux terres rares : un risque économique et stratégique
- Métaux rares : le CESE invite la France à se doter d’une stratégie
- L’Union européenne ambitionne de sortir de sa dépendance aux terres rares
- Le fonds souverain angolais FSDEA investit dans le développement de ses minerais de terres rares