La Russie débute le projet d’exploitation arctique “Vostok”

Officialisé le 26 novembre 2020, le projet d’exploitation pétrolière Vostok sur les côtes de la mer de Kara en Arctique a débuté. Alors que les majors pétrolières comme Total opèrent un virage stratégique vers les énergies renouvelables Rosneft, la compagnie russe qui porte le projet, estime pouvoir produire du pétrole avec une rentabilité équivalente à celle des pétromonarchies du Golfe. Le projet soutenu par le Kremlin confirme la volonté de Moscou de se servir de l’Arctique comme d’un vecteur de puissance.

Avec des réserves de pétrole arctique estimées à 7,3 milliards de tonnes et de gaz à 2,7 milliards de tonnes par le ministre des ressources naturelles russe, Moscou dispose d’importantes réserves d'énergie et donc de puissance. Ce qui n’a pas échappé à Vladimir Poutine qui a réaffirmer le 18 janvier dernier la stratégie arctique russe notamment via le projet Vostok. Ce projet devrait donc assurer encore plus une place de choix à la Russie; Rosneft estime qu'à terme la région produira autant que la Libye à plein régime! Grâce à ses immenses ressources, la Russie crée des liens commerciaux avec l’Europe (pipeline Nord Stream 1 et 2) mais également avec la Chine (gazoduc Power of Siberia) qui lui permettent, malgré ses modestes performances économiques d'être parmi les nations qui compte.

Afin de maintenir cette position, le Kremlin encourage depuis quelques années l’exploitation des zones arctiques de son territoire rendues exploitables de plus en plus facilement par la fonte des glaces. Dans ce contexte, la stratégie de Rosneft prend à rebours celle d’une major comme Total qui opère en virage stratégique vers les énergies renouvelables. À cet égard, l'entreprise a annoncé son retrait de l’American Petroleum Institute, le puissant lobby américain dont les positions climato-sceptiques l’ont apparemment refroidi.

Cette différence de stratégie entre le Kremlin, qui a concédé de larges avantages fiscaux pour permettre le lancement du projet, et l’Union Européenne, qui vient d'adopter le Green Deal pose question. En effet, bien que le pétrole et le gaz naturel soient des ressources limitées, elles demeurent, à l’heure actuelle, indispensables pour produire de l'énergie en quantités suffisantes et au meilleur coût.

Ainsi, à court et moyen terme se pose la question de la dépendance énergétique du Vieux Continent vis-à-vis de la Russie qui pourrait venir sérieusement concurrencer les producteurs arabes et américains. En effet, les coûts de productions russes sont la seule chose qui permet encore à ces derniers d’avoir un avantage concurrentiel. À plus ou moins court terme, la Russie est donc amenée à renforcer sa puissance. Pour l’Europe, il semble urgent de diversifier ses sources d’approvisionnement comme par exemple via le projet EastMed ou le projet de pipeline “sunnite”.

 

Pierre-Guive Yazdani

 

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